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Ecriveuse en herbe
27 mai 2007

Le profiler ***

Le profiler

Max était un profiler du FBI et Sarah une étudiante en journalisme. Enfin en théorie. Sur Internet en tous cas. Et le fait que Max n’ai en réalité jamais terminé ses études secondaires et travaille à mi-temps dans un vidéo-club ne regardait à son avis pas Sarah. D’ailleurs, elle mentait sans doute elle aussi.

Il racontait pour l’heure à la jeune femme – qu’il n’avait jamais vu mais espérait très jolie – sa dernière enquête fictive, un mélange de plusieurs de ses films préférés et d’une bonne part de ses propres inventions. Il traquait un serial killer démoniaque qui kidnappait ses victimes, les pendait par les poignets avec du fil de fer, les rasait entièrement et leur coupait les mains une fois qu’il n’y avait presque plus de sang dedans et qu’elles étaient parfaitement blanches et pures. Maintenant il tentait soit de trouver une suite gore et originale soit d’expliquer cette histoire de mains blanches et pures. Malheureusement, l’alcool qu’il avait ingurgité depuis le début de la nuit nuisait fortement à sa concentration.

Au final, ce fut la sonnerie du réveil qui lui fournit une échappatoire. « Je dois partir travailler, écrivit-il à Sarah.

_ On se reconnecte ce soir ? répondit la jeune femme.

_ Je risque de travailler très tard. Je te recontacte plus tard. Et défense d’en parler à la presse !

_ Promis ! »

Avec un soupir de soulagement, Max éteignit l’ordinateur. Une longue, très longue journée l’attendait.

Lorsque Max se reconnecta le lendemain matin (le temps de travailler, de dormir, de regarder des films et de re-dormir), pas moins de douze e-mails de Sarah l’attendaient. Ce qui lui mit immédiatement du baume au cœur. Cette charmante jeune femme, sans aucun doute belle, intelligente et célibataire depuis bien trop longtemps à son goût, avait mordu à l’hameçon. Encore quelques histoires pour rendre son personnage de profiler encore plus crédible, et il n’aurait plus qu’à la rencontrer… Et là…

Il déchanta dès le premier mail. Il contenait le scan de la première page du journal du jour. En couverture se trouvait décrit "son" meurtre rituel.

Max eu tout juste le temps de courir aux toilettes pour vomir – mais finalement, face à la cuvette blanche, rien ne voulut sortir. Il resta agrippé là quelques instants, tremblant et agité de spasmes. Puis une idée lumineuse le réconforta : c’était sans aucun doute un faux article créé et envoyé par une cinglée ! Il sorti de chez lui à toute allure, en caleçon et débardeur crasseux, rentra tout aussi précipitamment en réalisant qu’il était à moitié nu et sans un sous, s’habilla, pris son argent et alla acheter l’édition du jour. En pantoufles.

Il s’écroula sur le trottoir, le journal dans les mains. L’article était réel. Le meurtre aussi. Il avait eu lieu dans la nuit, suivant point par point le rituel qu’il avait inventé de toutes pièces, dans le vieil entrepôt désaffecté qu’il avait connu par l’un de ses nombreux anciens boulot. Et qu’il croyait être le seul à connaître aujourd’hui.

Max n’aurait pas su dire comment il rentra chez lui. Il avait l’impression que le ciel lui était tombé sur la tête. Chez lui, l’écran de l’ordinateur clignotait : Sarah, bien sûr. Il cliqua.

« Je te jure que ce n’est pas moi qui ai tout raconté aux journalistes !

Max la cru d’autant plus qu’il y avait une photo. Quoi qu’elle ait raconté à qui ce que soit, ce n’avait pas pu donner ce cadavre. A moins qu’elle ai donné l’idée à quelqu’un ?

Il relu l’article. Il aurait fallu que quelqu’un lise ses messages par-dessus l’épaule de Sarah et fonce immédiatement kidnapper une fille pour que lui, Max, puisse être la cause de ce meurtre atroce. Et encore, il aurait fallut que ce dingue habite dans le coin et qu’il ai déjà du fil de fer chez lui.

_ Je te crois.

_ Il y a eu des fuites ?

_ Apparemment. Heureusement les journalistes n’ont pas tous les détails.

_ Ah bon ?

_ Non, le tueur laisse encore une autre marque sur ses victimes. Notre bureau a dû les empêcher d’avoir l’info.

_ Qu’est-ce qu’il manque ?

_ Je ne peux pas te le dire ! Et si on te pose des questions, tu as tout découvert dans la presse, vu ?

_ Compris !

Une fois de plus, Max se laissa emporter par son personnage, mélangeant allègrement réalité et fiction dans un  jeu qui dépassait le simple but d’amener un jour Sarah (si elle était jolie) dans son lit. Il aimait faire ça, c’était sa drogue. Il laissa la future journaliste chercher différentes pistes, gardant les éléments intéressants pour quand il devrait lui donner une solution plausible tout en cassant ses théories, et agitait de temps en temps l’élément manquant comme un os devant le nez d’un chien. La technique marchait fort, Sarah ne se déconnecta pas une seule fois de la matinée et elle paraissait totalement captivée par l’enquête.

Lorsque Max quitta le cocon protecteur de son appartement, la réalité lui retomba dessus avec d’autant plus de force que le poids de la culpabilité s’y ajoutait. Non seulement quelque chose d’atroce s’était produit et sans doute à cause de lui, mais en plus au lieu de tenter de trouver une solution à ce mystère il continuait ce jeu malsain où il manipulait une jeune femme crédule voir carrément stupide. Cette invention avait forcément un lien avec le meurtre donc même s’il ne trouvait pas lequel, il devait y mettre fin.

Une fois derrière le comptoir de location de cassettes, la décision de Max était prise. Il tenterai de rencontrer Sarah et de coucher avec elle. Si ça ne marchait pas, il arrêterait toute cette histoire définitivement. Quand au véritable meurtre, il allait éviter d’y penser et surtout ne parler de rien à personne, il n’avait pas la moindre envie de faire un séjour derrière les barreaux.

Une fois chez lui, Max hésita longuement avant d’oser allumer l’ordinateur. Il faillit même écrire à Sarah sans lire le dernier e-mail qu’elle lui avait envoyé. Mais celui-ci était marqué URGENT !!!!!! avec six points d’exclamation. Max l’ouvrit.

Il contenait plusieurs profils possibles de l’assassin et deux proposition de pièges à lui tendre. « C’est absurde ! » s’emporta Max. Depuis quand est-ce que les profilers de la police écoutent les divagations d’étudiante en mal de publicité ? De toutes les tordues qui surfent sur le net, pourquoi avait-il fallut qu’il tombe sur celle qui ne rêvait que de se mêler de son enquête inexistante ?

Il réalisa alors qu’il y avait sans doute un véritable inspecteur chargé de mener cette enquête, et que les chances pour que son prénom soit Max, Maxime ou quelque chose d’approchant étaient à peu près aussi grandes que de gagner une Ford dans une tombola Toyota. Il était déjà en train d’imaginer une excuse au cas où Sarah s’en apercevrait (ce qui ne tarderait pas, surtout si elle étudiait réellement le journalisme entre deux longues séances d’Internet) quand il se rappela de sa ferme résolution de l’après-midi. Non, mieux valait régler cette histoire une bonne fois pour toutes. Plus de mensonges. En tous cas plus à Sarah. Elle n’était pas connectée mais il lui écrivit un e-mail lui donnant rendez-vous le lendemain pour lui donner le dernier élément manquant.

Il s’était fait beau et avait même mis du parfum, pour la première fois depuis si longtemps qu’il se demandait si le minuscule flacon retrouvé sur son étagère était bien du parfum, ou si celui-ci était périmé. Mais dans la puanteur des cigarettes et de la sueurs des danseurs elle ne s’en apercevrait sûrement pas. Il attendait, nerveux, en tentant de se remémorer tout ce qu’il avait bien pu lui raconter sur son métier de profiler pour être sûr de ne pas faire de gaffes le moment venu. C’est vrai qu’ils avaient surtout parlé de meurtres et de l’assassin fan de mains blanches. En fait elle avait même l’air d’en savoir beaucoup plus long que lui, surtout depuis qu’elle lui avait envoyé les articles de journaux. Bah, il jouerait les impénétrables professionnels et puis voilà. Il ferait dévier tous les sujets se rapportant de près ou de loin au meurtre. Il s’en sentait capable.

Ce n’est que trois heures plus tard que Max commença à admettre que Sarah lui avait posé un lapin, et au bout de trois autres heures qu’il renonça et rentra chez lui, rageur. Le lendemain, à tout hasard, il acheta le journal pour voir si on avait retrouvé l’assassin. C’était le cas, on l’avait arrêté au cour de sa deuxième tentative d’enlèvement.

L’assassin était une jeune femme du nom de Sarah Rickwod, 21 ans, étudiante en journalisme. Elle assurait être innocente et expliquait qu’un certain Max, profiler du FBI, pouvait prouver ses dires.

Max regarda attentivement la photo et eu un violent pincement au cœur de regret. Sarah était vraiment très, très jolie.

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Commentaires
V
J'adore ce texte!
L
Ecrit à Deslyres en mai 2007. Il fallait placer la phrase prise au hasard "C’est absurde ! s’emporta Max. Depuis quand est-ce que les profilers de la police écoutent les divagations d’étudiante en mal de publicité ?" au milieu du texte. Faire une histoire avec un vrai profiler me tentait moyennement, j'ai donc fait de Max un profiler imaginaire et je me suis bien amusée à inventer ses buts et son caractère, puisqu'il fallait à la fois qu'il tienne debout et qu'il prononce la fameuse phrase naturellement. J'ai moins creusé le personnage de Sarah mais j'avais décidé depuis le début qu'elle serait la tueuse, pour une raison toute bête : les tueurs en série sont toujours des hommes, j'avais envie de changer un peu.
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  • Envoi d'histoires, textes, nouvelles, scénario de BD et tentative de roman que j'ai écrit. Plus elles sont bien, plus il y a d'étoiles après le titre. Bonne lecture ! (textes protégés donc demandez avant de les utiliser merci)
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