Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Ecriveuse en herbe
2 décembre 2006

Handicapés de mémoire *

Handicapés de mémoire

« Qu’on ne me réveille pas avant que l’école aie disparue de la surface de la Terre ! » criais-je à ma mère, avant de claquer la porte de ma chambre et de me jeter sur mon lit. J’aurais pas dût. Parce que le lendemain, lorsque j’ai ouvert les yeux, l’école avait disparue de la surface de le Terre.

Elle n’avait pas disparue parce tous les bâtiments ont explosés, ou parce qu’une troisième guerre mondiale retenait toutes les attentions. Non. Ce fut pire.

D’après JJR, dont je parlerai plus amplement plus tard, l’humanité s’est mise à souffrir ‘‘de perte d’acuité mémorielle ultra généralisée’’. En clair, ça veut dire que tous les gens, à par moi et une dizaine d’autre cas, sont devenus des handicapées de la mémoire. Et je peux vous dire que ça fait un sacré choc.

Surtout au début, parce que je croyais être la seule rescapée. Ou peut-être au tout début début, quand je pensais que seule ma famille avait été touchée, et que je me demandais comment j’allais tous les amener à l’hôpital, et je sais pas conduire, et s’ils ne guérissent pas on va me placer en tutelle ! Enfin, j’ai un peu paniqué, quoi. Et ça s’est pas arrangé quand j’ai fait tout l’immeuble pour chercher de l’aide, et que je les ai tous vus là, à se demander qui ils étaient les uns les autres, et s’ils se connaissent leur nom SVP ? Il faut avouer que ça flanque la trouille, ce genre de choses.

Enfin, du coup, plus d’école (je suis allée vérifier, au cas où), puisque personne ne se souvenait du quart d’un programme de CP. Dans les magasins, personne ne s’était rappelé de les ouvrir, mais j’ai put trouver une supérette ouverte 24h/24 dont la caissière ne se rappelait pas le sens du mot ‘‘payer’’. Plutôt pratique. J’ai regardé sur sa carte d’identité son nom et son adresse, puis, après lui avoir certifié que c’était bien les siens, je me suis servie généreusement. Ca faisais quand même très peur, tous ces gens qui me voyaient faire n’importe quoi et qui s’en foutaient. On aurait dit des zombies intelligents.

Les premières semaines, je m’en souviens mal. Je me rappelle avoir expliqué à une dame que le gamin qui pleurait par terre était à elle, et que je lui rappellerai comment se servir d’un ouvre-boite quand elle s’en serai occupé. Je me rappelle avoir dormit chez des gens que je ne connaissais pas, et qui ont passé la nuit sur leurs albums photos. Je me rappelle avoir dût expliquer à ma mère que mon frère et moi étions ses enfants. Je me rappelle avoir cognée de toutes mes forces sur la tête d’un type, dans un accès de rage, avec une grosse clé anglaise. Il m’a flanqué une assez belle tannée pour que je ne l’oublie pas de sitôt, celui-là. Mais à par ces quelques moments, c’est très flou dans ma tête. A croire que l’amnésie, c’est contagieux.

Puis j’ai rencontré Tony. A ce moment-là, je croyait toujours être la seule rescapée de la planète (surtout que les téléphones étaient morts, et la télé avec). Que le monde était uniquement plein d’handicapés de la mémoire. Mais j’ai bien vu qu’il était différent, parce qu’en piquant dans le magasin, il a jeté un petit coup d’œil rapide autours de lui, alors que c’est tout naturel aux yeux des autres. Sans hésiter, je lui ai demandé, bien en face, s’il se souvenait de l’année dernière, ou s’il était comme les autres zombies de services :

_Et toi, tu t’en souviens ou tu cherche ton nom ?

_Moi je me souviens. Sans problème.

J’aurais pas cru revoir un jour un sourire pareil. Tout juste s’il ne m’a pas embrassée. C’était, comme moi, un rescapé. Il m’a tout raconté sur lui et l’association. En fait, c’est un groupe de rescapé (trois ou quatre) et une vingtaine de d’amnésiques assez malins et curieux, qui cherchent à comprendre ce qu’il s’est passé. Parce qu’on n’en sait rien. Il n’y a apparemment pas eut de guerre pendant mon sommeil, ce n’est donc pas une arme nouvelle. Bon, je vais pas vous faire part de toutes les hypothèses, il y en a trop, mais personnellement je penche pour l’attaque de martiens. Ca expliquerai pourquoi certains y ont réchappé, et on sait pas pourquoi eux et pas d’autres. JJR cherche encore une explication.

JJR, c’est le coach du groupe. Il est vachement intelligent, et même d’après ses papiers il était un célèbre scientifique, avant de tout oublier. Mais je sais que si on s’en sort, ce sera grâce à lui. Après tout, il n’y a pas de raison : on est tout un monde valide, intelligent et en pleine santé, débordant de moyens. On va s’en sortir, c’est obligé.

Tant que les ordis marchent, on tente l’appel au secours par internet. Dans le dossier, je sais pas pourquoi, ils ont voulu avoir mon témoignage, alors le voilà. Si vous savez quoi que ce soit d’utile, vous connaissez l’adresse. Bye.

fin

Publicité
Publicité
Commentaires
L
Ecrit en 1999. J'ai écrit la première phrase, puis j'ai essayé de l'expliquer. Le titre n'est venu qu'après, je n'ai même pas pensé à parler d'amnésie, je trouvais qu'il sonnait bien comme ça.
C
Bonjour Luma,<br /> <br /> Je suis venue te lire parce que le titre de ta nouvelle m'a intriguée. Elle est intéressante, ton histoire. Continue!
Ecriveuse en herbe
  • Envoi d'histoires, textes, nouvelles, scénario de BD et tentative de roman que j'ai écrit. Plus elles sont bien, plus il y a d'étoiles après le titre. Bonne lecture ! (textes protégés donc demandez avant de les utiliser merci)
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Publicité