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Ecriveuse en herbe
3 décembre 2006

La malédiction des Zioptes *

La malédiction des Zioptes 

Tout a commencé une nuit de pleine lune, une sombre nuit d'orage qui jette foudre, pluie et mauvais sorts aux pauvres humains impuissants... La sorcière de l'orage sentait avec délice la peur, la peur irraisonnée de l'orage qui, aujourd'hui encore, terrorise l'homme moderne. Mais, dans une maison de campagne, un couple de retraités, à l'écart du reste du monde, au lieu d'avoir peur de la puissance de la foudre... dormait.

La sorcière de l'orage a supporté pas mal de choses, depuis qu'elle a repris ce job, mais là trop, c'est trop. C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Faut quand même voir à ne pas exagérer. Comment, elle se décarcasse à faire un orage digne de l'enfer, avec le vent qui vente, le tonnerre qui tonne, la foudre qui foudroie, et eux, ils s'en fichent !

Ils vont s'en mordre les doigts. En avant, les  Zioptes!

Petit aperçu historique. Les Zioptes, de tout temps, ont pris plaisir à gâcher la vie des humains, sur ordre des sorcières (il ne faut pas leur en vouloir : ils sont prévus pour). Autrefois, le moyen le plus sûr d'embêter les gens étais de rendre leurs bestioles malades, et de les infester de nuisibles : les victimes allaient brûler quelques folles par-ci par-là, et les Zioptes rigolaient bien. Maintenant, le meilleur moyen d'obtenir une bonne crise de désespoir, c'est de s'attaquer à ce que les humains ont de plus cher, de plus utile, ce que les rends vraiment très fiers d'eux : l'électricité. Elle obéirait aux ordres d'une fée. Ca tombe bien, les Zioptes n'aiment pas les fées non plus.

Fin de l'aperçu.

Bref, les Zioptes, c'est un sale coup. Ils se sont glissés, avec la pluie, le long de la maison. Ils ont creusé les tuiles fragiles et les murs poreux pour que l'eau se glisse dans la maison, et l'ont guidée... jusqu'au disjoncteur. BZIAOUMMZZZZZK !

Le disjoncteur a disjoncté.

Le lendemain, Nona descendait, comme tous les jours, faire le café pour son Kaque chéri. Nona est une grand-mère qui n'est pas italienne, mais Nona c'est mieux que Mamie, alors va pour Nona. Kaque, ce n'est pas italien, mais c'est un surnom. Ce point étant réglé, passons.

Donc, Nona prit la carafe et la plaça sous le robinet de la cuisine pour recueillir l'eau, comme tous les matins, inconsciente du drame qui se jouait dans son dos et des ricanements des Zioptes, à ses pieds. C'est à peine si elle prit garde à la fureur de l'orage, là-dehors (la sorcière voulait vérifier le travail). Mais elle se prit le fait en pleine figure : il n'y avait plus d'eau ! L'installation de la Pompe, par son mari, marchait à l'électricité.

Bref tremblement d'angoisse de l'humaine face à la malédiction : ce n'est tout de même pas aussi grave que ce à quoi je pense, n'est-ce pas ?

Elle actionna l'interrupteur. Si. C'était aussi grave. Il n'y avait plus d'électricité dans toute la maison !!!!

Et plus d'électricité, ça veux dire plus de lumière, plus d'eau, plus de chauffage, plus rien. Camping sauvage dans leur propre maison, ça peut faire vacances vu de loin, mais ça ne le faisait pas vraiment, en fait. Planqués sous le placard, ricanant comme des souris, les Zioptes savouraient leur victoire facile.

Mais notre courageuse Nona cachait un as dans sa manche: un bricoleur de mari qui savait comment traiter ce genre d'incident. Dès son réveil, au lieu de la sympathique tasse de café qui l'aide, d'habitude, à ouvrir les yeux, celui-ci se trouva traîné jusqu'au disjoncteur avec pour mission de réparer tout ce bazar. Et en vitesse, parce qu'avec tout ce vent, il ne fait pas chaud, ici.

Kaque se met donc, le tournevis à la main, en quête de la panne. Panique chez les Zioptes : pas question de laisser gâcher une si belle panne ! Aussitôt, toute la bande fonce comme un seul ziopte à l'intérieur de l'engin, et, une fois le disjoncteur réinstallé, se jettent dessus de toutes leurs forces et le font sauter à nouveau, sous le regard incrédule du maître de ces lieux qui commence à comprendre qu'il n'y aura pas de café ce matin. Mais ne s'avoue pas vaincu pour autant. Il en faut plus que ça, pour abattre celui qui a posé tout le circuit électrique de la maison. Non mais, comme s'il allait se laisser faire !

Nona lui a tenu la lampe de poche jusqu'au soir, sous un vent glacé. Cent fois, il tenta une nouvelle attaque. Cent fois, les Zioptes la repoussèrent. Les maléfiques petites créatures étaient épuisées, mais quelle victoire : les retraités abandonnent le terrain ! De fait, utilisant la seule machine qui marchait encore ( la voiture ), ils se réfugièrent chez leur fille aînée, qui les hébergea pour la nuit. Mais les Zioptes ignoraient que ce n'était que partie remise.

En effet, dès le lendemain, ils revinrent en force :  un sorcier du tout puissant EDF venait les exorciser et ramener ces lieux sous la protection de la bienveillante fée Electricité. Sans jamais se douter de leur présence, ils venaient de vaincre les sinistres Zioptes !

Mais la sorcière ne l'entendait pas de cette oreille. Lorsque ses fidèles petits monstres revinrent l'oreille basse, elle leur passa le savon de leur vie. Et les renvoya dans la maison, pour affronter ces insolents humains, non plus en les privant de courant, ce qui risquerais de faire revenir le sorcier de l'EDF, mais en leur gâchant la vie, comme ils sont si doués pour le faire. Sur ces bonnes paroles, elle les renvoya sur Terre.

Les Zioptes ont d'abord pensé attaquer par le point faible de bien des humains : la télévision. Mais il était évident que ça n'affecterait que très peu ces deux-là, et ils s'en prirent à l'estomac (c'est plus sûr). Le four, puis la cafetière, rendirent l'âme presque coup sur coup. Drame ! Douleur ! Désolation !

Et par-dessus le marché, voilà qu'arrivent les vacances et leur cortège d'enfants et de petits-enfants. Mais Nona n'est pas du genre à abandonner parce que de simples objets en ont décidé ainsi. Escortée de sa seconde fille, elle commence à faire la tournée des magasins, pour repérer un four. Ce ne sont pas les Zioptes qui vont l'arrêter !

Non, ce qui l'arrêta net, c'est cette étrange découverte : les fours, tout comme les dinosaures il y a des millions d'années, sont une espèce en voie de disparition. Mince alors. Il n'existe plus que des fours multifonctions avec micro-onde et lecteur DVD intégré (trop compliqués, et elle a déjà un micro-onde), ou des vieux trucs qui reviennent à la mode : le four incrusté dans la gazinière (trop encombrant). Bref, pas le moindre four bien classique en vu.

Si ! Enfin ! Miracle ! Un four normal, bien qu'un peu petit, est en vente à Géant Casino ! C'était bien la peine de se faire tous les pros de l'électroménager... enfin, passons.

Le four fut commandé, payé, emporté... Entre-temps, Nona partie à la chasse à la cafetière, et trouva assez facilement son bonheur. Les vacanciers allaient arriver, il fallait mettre la maison en chantier pour les accueillir, et les nouveaux outils de cuisinier restèrent dans leurs cartons, en attendant qu'on daigne avoir besoin d'eux ( car ils étaient arrivés la veille du jour J).

Arriva le moment tant attendu des vacances. Et, bien entendu, l'instant solennel de brancher la cafetière (on a commencé par le plus utile au petit déjeuner...). Après une lecture minutieuse du mode d'emploi, contact... On pouvait sentir, dans le silence quasi religieux, comme une sorte de tension... On entendait le bruit de l'eau qui coulait, goutte à goutte... Mais... Pas dans la cafetière !!!! Les malveillants Zioptes avaient sournoisement dévié le cours de l'eau qui se mit à dégouliner le long de la table dans le but évident d'inonder toutes les chaussures à sa portée. Dans la prise électrique, les maléfiques petits lutins noirs responsables du court-circuit ricanaient ouvertement.

Ce matin-là, les vacanciers burent du café soluble.

Avec toutes ces émotions, ils ne sortirent pas immédiatement le four de son carton. Fatale erreur que les Zioptes eurent tôt faite de mettre à profit, cabossant à qui mieux mieux la porte de l'appareil.

Lorsque Nona vit le four ainsi amoché, elle refusa de l'installer, furieuse, et voulut aller le rendre. Malheureusement pour elle, le service après vente était fermé pour cause de pont. Revenez après-demain. Tant pis ; on se passera de gâteaux pendant deux jours ! (tout le monde n'était pas d'accord, mais le choix étant très limité...)

Et deux jours plus tard, comme convenu, les bons génies de la Garantie remboursèrent le mauvais four. Nona, méfiante, refusa cependant de l'échanger contre un neuf. Elle n'avait plus confiance en cette marque, et décida de reprendre sa vaine traque de cette espèce si rare. Les cafetières étant plus faciles à trouver car elles se déplacent en troupeau le long des rayons, elle put offrir du vrai café à toute la maisonnée ( la cafetière choisie était italienne, pas électrique... Quand même !). Encore un point pour les humains.

Là, les Zioptes en ont vraiment, mais alors vraiment, marre, plus que Marre (mais de quoi se plaignent-ils, ceux là ? Ce n'est pas eux qui ont passé des vacances entières sans gâteaux !). Mais pas assez, tout de même, pour affronter la colère de leur sorcière mal-aimée, qui les foudroierait sans doute de fureur. Quand elle a décidé de faire un exemple, celle-là... Mais mieux  vaut éviter les critiques, aussi. Cherchant des bêtises à faire, en l'absence du futur nouveau four, ils profitèrent de la balade quotidienne de la maîtresse de maison pour faire chauffer la cafetière ( tellement qu'à son retour, elle cru l'avoir oublié sur le feu...), brûlant le café et faisant fondre le joint en caoutchouc. Pas besoin d'électricité pour casser les machines...

Mais quand les cafetières fondent, des fours apparaissent miraculeusement chez Conforama. Il est encore plus petit que l'autre, mais tant pis, il fera l'affaire. Et, pour aller avec ces bonnes nouvelles, une promotion sur une certaine marque de café offrait une cafetière (électrique), et, encore plus fort, le voisin leur offrit une autre cafetière (italienne), pour se faire pardonner d'une sombre histoire de remorque.

Le plus incroyable étant, bien sûr, que tous ces appareils fonctionnent parfaitement... pour le moment. Les Zioptes ont-ils renoncés ? La sorcière les a-t-elle envoyé pourrir la vie de quelqu'un d'autre ? Ou bien ce calme apparent cache-t-il une nouvelle vague d'assaut ? Seul l'avenir nous le dira.

Fin 


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Commentaires
L
Ecrit en 1999, c'est une histoire parfaitement vraie ! Enfin, mon interprétation peut-être légèrement fantaisiste d'évènements qui sont arrivés à mes grands-parents. Disons qu'après "Technologie moderne", j'avais l'impression que je n'avais qu'à prendre une anectode et l'écrire pour en faire un truc drôle... Ce qui n'est pas tout à fait juste.
Ecriveuse en herbe
  • Envoi d'histoires, textes, nouvelles, scénario de BD et tentative de roman que j'ai écrit. Plus elles sont bien, plus il y a d'étoiles après le titre. Bonne lecture ! (textes protégés donc demandez avant de les utiliser merci)
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